dimanche 30 décembre 2012

L'encrier a disparu, de Bernard Cogniaux

Vu le 15 novembre 2012 au Public

Crédit: D. R.
L'humour à la russe est au programme de cette fin d'année du côté du Public. La plume de Daniil Harms est celle d'une grande voix surréaliste tue par la censure soviétique. Volubiles autant que dada, les mots du poète s'envolent dans un collage conçu par Bernard Cogniaux pour la jeune équipe du Public.

Crédit: D. R.
Le spectacle est à l'image de l'œuvre du fondateur du mouvement artistique Obériou (Association pour l'art réel): imprévisible, désordonné mais dont le fond se révèle au détour de la réplique. Harms dénonce le poids du pouvoir sur la condition de l'artiste. Il rend hommage avec humour noir à ses prédécesseurs, part de situations du quotidien. L'auteur flirte avec la folie, dans laquelle il sombra en fin de vie. La difficulté du comédien se situe là où le sens de ce qu'il déclame est apparemment absent. C'est un tout que le spectateur doit prendre en face: celle d'une situation où l'artiste est rendu muet une fois que son outil - ici l'encrier- lui est volé.

Crédit: D. R.
Bernard Cogniaux fait le choix d'une mise en scène diablement énergique. Il bénéficie d'une scénographie astucieuse, du prolifique Ronald Beurms, qui utilise à la perfection l'étroit espace imposé par la salle des voûtes du théâtre de Saint-Josse. Les six jeunes comédiens surgissent tour à tour de boîtes en carton et conversent à l'infini. C'est verbeux mais terriblement succulent. Le texte est bien en bouche en plus d'être dynamiquement joué (petite préférence pour la distribution masculine (Cédric Cerbara, Maroine Amimi, Grigory Collomb et Réal Siellez). Pour faire oublier le désordre du texte, le metteur en scène choisi parfois l'aspect cabaret sans tomber dans les poncifs. Le divertissement est intelligent et construit de belles images. La belle surprise de cette fin d'année!

 
"L'encrier a disparu", jusqu'au 31 décembre au Public.

vendredi 28 décembre 2012

Silence en coulisses, de Daniel Hanssens

Vu le 24 novembre au CC d'Auderghem
Crédit: D. R.

La Comédie de Bruxelles a l'habitude de nous offrir sa comédie de fin d'année. Après Toc-Toc, Le Père Noël est une ordure ou encore Cuisine et dépendances, le choix de Daniel Hanssens s'est porté sur le tube de Michael Frayn, Silence en coulisses. Ce vaudeville se moque de la comédie de boulevard et impressionne par son rythme endiablé.



Tout commence dans un intérieur bourgeois comme on en voit des tonnes dans les théâtres parisiens. Une femme s'apprête à regarder la télévision, le téléphone sonne, l'intrigue démarre. Quand tout à coup, une voix résonne dans la salle, c'elle d'un metteur en scène (Pascal Racan). On comprend alors vite qu'on assiste à une répétition d'une pièce qui doit se jouer le soir-même. Mais rien n'est au point. La pièce a un texte assez passable et les comédiens ne sont pas prêts. À ces inconvénients notoires s'ajoutent les ambitions de chacun. Certains pensent décrocher la timbale avec ce succès de planches, d'autres aimeraient plutôt jouer du Shakespeare. La vie de troupe connaît ses amitiés, ses amours et ses oppositions. Un petit monde se crée et se vit en coulisses, parfois à l'opposé de ce qui se joue sur scène.

La deuxième partie retourne le décor et nous plonge dans les coulisses le soir de la première. Ça s'agite en coulisses car certains font leurs caprices. Divas et maladroits se croisent, s'aiment et se chamaillent. Et ce qui paraît bordélique derrière le décor ne doit pas transparaître. C'est la magie du théâââââââtre! Pourtant qu'est-ce que ça gueule derrière le décor. Les déboires de la troupe sont menés tambour battant par la distribution énergique de laquelle s'extrait une fois encore Laure Godisiabois, en comédienne boulevardienne un peu maternelle. Pour compléter la distribution, on retrouve Marie-Hélène Remacle, Michel Hinderyckx, Didier Colfs, Victor Scheffer, Alice Moons, Stéphane Fenocchi (très en forme) et Alexia Depicker.

On vous laissera savourer par vous-même le troisième acte qui nous replace sur le plateau en fin de tournée de la dite pièce. Bon divertissement de fin d'année, la pièce n'évite parfois par des côtés farcesques téléphonés. Mais le rythme est tellement bien tenu (un jeu très physique) que la mécanique fonctionne pendant les deux premiers actes. La longueur du spectacle, et l'entracte intervenant une demi-heure avant la fin gâchent un peu le plaisir.


jeudi 27 décembre 2012

Les Contes hérético-urbains, au Poche

Vu le 14 décembre au Poche


Crédit: Yves Kerstius
Après avoir été érotico-, héroïco- ou bobos, les contes se la jouent hérétiques au Poche. Il est question ici de ces hérésies contemporaines où les dieux sont remplacés par les enjeux personnels de l'individualisme humain. Pour cette nouvelle salve de fables modernes, le théâtre du Bois de la Cambre a convié quatre plumes connues des scènes belges.

Crédit: Yves Kerstius
Dans "Minnie 7 ou God save America", René Bizac convoque une certaine Amérique, celle qui rêve d'un monde de conte de fées et qui se délecte d'un royaume factice et dégoulinant de bons sentiments: l'empire Disney. Gwen Berrou y interprète une future Minnie qui figurera au spectacle de l'année dans le grand parc californien. Mais derrière le rose des paillettes, c'est une situation professionnelle dégradante. Le désenchantement est au rendez-vous de même qu'une "explosion" de colère.

Tout le cynisme de Thomas Gunzig est transmis par le monologue de Cathy Grosjean. Elle  incarne dans "All Inclusive" une mère odieuse donnant un coup de poing cinglant au mythe de l'enfant-roi. Perdre un enfant? À quoi bon se lamenter s'il en reste un autre?

Crédit: Yves Kerstius
Laurence Bibot continue son exploration d'icône féminine en les démolissant. Pour "Paris brûle-t-elle?", elle confie la lourde tâche à Ariane Rousseau d'annoncer au monde. L'immolation accidentelle de Paris Hilton lors de son arrivé aux Jeux d'hiv'. Fidèle à sa folie, l'auteure effleure le mythe de la star qui n'a rien fait de sa vie mais fascine quand même.

Enfin, le quatuor se clôt sur l'hommage de Riton Liebman à son père Marcel. Avec "Liebman renégat!", il rappelle combien il était difficile pour l'intellectuel renommé d'être juif de gauche et par dessous tout pro-palestinien. Ce sont les manichéismes d'un conflit qui pourrit le monde qui sont ici retournés grâce à la justesse et l'amour contenus dans ce texte. Le fils regrette son manque d'engagement. Le paradoxe d'avoir été préservé de la Shoah et de ne pas s'en intéresser, voire de ne pas y trouver un bout d'identité.

Crédit: Yves Kerstius
Face à cette mosaïque d'histoires, il est difficile de ne pas les comparer entre elles. Certes, certaines s'emparent de thèmes qui parlent plus ou ont une base beaucoup plus polémique. Mais autant le conflit israélo-palestinien et la question maternelle sont porteurs de sens, autant l'apparente superficialité des Minnie et Paris Hilton démontre à quel point nous sommes endormis par des mythes du showbiz, construits par les médias et qui apportent du rêve dans une société laïcisée en recherche de symboles. Que ceux-ci soient factices ne fait aucun doute. 
Ces quatre portraits font mouche et forment un tout dans lequel chacun peut se reconnaître. L'humour est le liant de l'ensemble. Suis-je capable de donner du rêve aux gens en sacrifiant les miens? Dois-je tout donner pour ma famille comme me le demande la société? De quelle manière les nouvelles idoles m'embrument l'esprit? Faut-il que je m'implique dans un conflit qui touche ma famille mais se déroule à des milliers de kilomètres de moi?
Des questions que chacun adaptera à sa propre existence. Le spectacle reste un moment de fêtes tant les bons mots et la maladresse des protagoniste font fuser les rires.

Les Contes hérético-urbains au Théâtre de Poche jusqu'au 29 décembre.

vendredi 21 décembre 2012

La Conspiration des Planches – 19/12/2012 19h – Fêtez jeunesse!

Dernière de l’année...
Les contes hérético-urbains - Crédit: Yves Kerstius

De l'influence... - Crédit: D. R.

Des spectacles pour tous les âges également avec le festival Noël au Théâtre qui fête ses 30 ans. Sa coordinatrice artistique, Cali Kroonen et François Kah (pour le spectacle Daniel(le)s).

JOYEUSES FÊTES À TOUS !


NOUS SERONS DE RETOUR LE 9 JANVIER POUR LES PREMIÈRES CRÉATIONS DE L’ANNÉE…


PODCAST – Dès vendredi sur Demandez Le Programme et dans le centre de ressources de la Bellone.
La Conspiration des Planches, le magazine des arts de la scène de Radio Campus Bruxelles. Tous les mercredis à 19h et le jeudi en rediffusion à 13h30.

vendredi 14 décembre 2012

La Conspiration des Planches – 12/12/12 19h – Contes d’ici et d’Iran


Les créations de fin d’année s’amoncellent:
 

Vivons... - Crédit: D. R.

- Les Contes Hérético-Urbains, la formule de fin d’année du Poche unit quatre auteur (Gunzig, Bizac, Bibot et Liebman), quatre metteurs en scène et quatre comédiens pour quelques décortiquages de nos croyances contemporaines. Jusqu’au 29 décembre.


- Vivons heureux en attendant la mort, quand Dominique Rongvaux s’empare de la langue de Pierre Desproges. Jusqu’au 22 décembre aux Riches-Claires.




Good Mourning - Crédit: Cici Olsson
- Good Mourning, où Florence Minder mâchonne l’American English. Au Théâtre National jusqu’au 22 décembre.

Deux invités en deuxième partie d’émission. Du 16 au 19 décembre, le festival UNTITLED proposera une série de lectures de pièces iraniennes au cœur de Tour & Taxis. Emmanuel De Candido et Philippe Beheydt nous expliquent comment s’est monté le projet , comment le choix des textes s’est effectué et quel est l’intérêt de l’écriture iranienne. Nous aurons droit à un extrait de la pièce UNTITLED (je suis une créature de Twitter) qui ouvrira le festival.

PODCAST – Dès vendredi sur Demandez Le Programme et dans le centre de ressources de la Bellone.

La Conspiration des Planches, le magazine des arts de la scène de Radio Campus Bruxelles. Tous les mercredis à 19h et le jeudi en rediffusion à 13h30.

vendredi 7 décembre 2012

La Conspiration des planches - 05/12/2012 19h - Cocktail stambouliote


Cette semaine, la Conspiration sort des ces habituelles critiques hebdomadaires pour prendre l'air... un air turc entre Asie et Europe.

La Maison des Cultures de Molenbeek organise pour la troisième année consécutive le festival Sounds Of Istanbul du 6 au 8 décembre. Cette programmation pluridisciplinaire propose artistes stambouliotes et belgo-turcs. Danse, théâtre, musique, la fête et la passion créative seront au rendez-vous de cet événement, qui a su tisser des liens avec d'autres événements majeurs comme le 0090, festival des arts turcs proposés notamment à Anvers.

L'ouverture du festival se fera au VK avec un concert de Baba Zula (dont on entend le titre "Aşıkların sözü kalır" dans l'émission). La clôture aura lieu aux Ateliers Claus avec une pléiade de DJ venus tout droit du Bosphore.

Pour nous parler de ce festival, nous recevons:

- Sonia Triki, programmatrice de Sounds Of Istanbul.

- Sibel Dinçer, artiste belgo-turc qui proposera diverses choses dans ce festival dont le Pinar et Sibel Jazz Project le 7 à 20h.

- Hilal Sönmez, comédienne, accompagnera Sibel dans le work-in-progress "Voilà la tête, voilà le tronc, voilà les ailes" de l'écrivaine stambouliote Sevim Burak. Ce sera le 8 à 18h.

Du beau monde donc...

PODCAST – Dès vendredi sur Demandez Le Programme et dans le centre de ressources de la Bellone.

La Conspiration des Planches, le magazine des arts de la scène de Radio Campus Bruxelles. Tous les mercredis à 19h et le jeudi en rediffusion à 13h30.

samedi 1 décembre 2012

Quelques reprises du moment - 01/12/2012


Crédit: Émilie Lauwers
- Occident: En mettant en scène un couple en déliquescence, Rémi De Vos questionne les rapports Nord-Sud et Occident-Orient. Philippe Jeusette s'emmerde dans le couple qu'il forme avec Valérie Bauchau. Du coup, il préfère aller boire des coups jusqu'à ce que certains "Orientaux" se mettent sur son chemin. Il revient à la maison raconter ses mésaventures dans les oreilles d'une femme qui privilégie l'insulte au réconfort. Frédéric Dussenne mâtine du Michel Sardou (dont l'horrible ou second degré - on a toujours pas compris, le chanteur non plus - "Le temps des colonies") avec une langue crue et drôle dans une scénographie qui privilégie l'intérieur populaire. À (re)voir. Jusqu'au 15 décembre au Marni pour le Rideau de Bruxelles. Vu en mai 2011 au Petit Varia.

Crédit: D. R.

- Cyrano de Bergerac: Deux productions de la saison dernière reproposaient le classique de Rostand. Créé au Théâtre de Namur en coproduction avec Le Public, le Cyrano de Michel Kacenelenbogen s'incarne dans un Olivier Massart impétueux à souhait. Dans un décor impressionnant -successivement taverne, champ de bataille et couvent-, cette production opte pour un classicisme soigné où les seconds rôles manquaient cependant de soin dans leur interprétation. Jusqu'au 2 décembre au Centre Culturel d'Uccle. Vu à Namur le 13 avril.