mercredi 10 juillet 2013

AVIGNON Off 2013 - Mes échos du Off (1)

Voici quelques commentaires sur les spectacles vus dans ce Off qui bat les records cette année avec plus de 1.200 spectacles. Entre des affiches affreuses et des titres débiles ("Le pet, le prout et le prof", "Mon poing sur ton I", "Le con, la cruche et le chaud lapin", etc.)*, j'ai dû opérer quelques choix...

L'ami des Belges

Crédit: Dominique Gaul
Jean-Marie Piemme s'inspire de l'affaire Bernard Arnault pour son nouveau texte créé à Avignon. Dans L'ami des Belges, Fabrice Schillaci (habitué de Piemme pour avoir incarné avec succès le fameux chien qui dialoguait avec son maître sur la nécessité de mordre ses amis) incarne un drôle de PDG milliardaire et français qui tombe en panne dans la campagne belge, un comble pour cet homme pour qui tout est programmé. Entre un champ de betteraves et une pâture de Blanc-Bleu-Belge, il profite de ces heures chèrement perdues pour dicter à son nègre les premières pages de son autobiographie. Un ouvrage où il désire communiquer aux sujets d'Albert II son indatable désir de vouloir devenir Belge, un leurre dans une opération de séduction bien préparée. L'humour côtoie le cynisme dans cette farce remplie de belgitude qui ne manque pas d'égratigner les deux côtés de la frontière belgo-française. Schillaci joue les colériques facétieux, sans excès, qui déracine ses plantes vertes pour mieux réimplanter les siennes. La  mise en jeu de Jean Lambert utilise avec poésie et émotion quelques monuments de la culture de la belge patrie. Soutenu entre autres par le Théâtre de Liège (ex-Théâtre de la Place), le spectacle n'a cependant pas encore de dates prévues la saison prochaine. (Vu le 9 juillet)

Jusqu'au 28 juillet  aux Ateliers d'Amphoux à 12h30.

Nés Poumon Noir

Crédit: Leslie Artamonow
Simon Delecosse ne s'attendait certainement pas à un tel accueil à Avignon pour son spectacle musical. Le public est debout après l'heure dix d'un slam lucide et joliment mis en scène. Sous le nom de Mochélan, l'artiste écrit depuis plus de dix ans sur l'asthme carolorégien du corps Belgique. Chômage, délinquance, mauvaise gestion publique, tout y passe. À 30 ans aujourd'hui, il monte sur scène pour revenir sur cette décennie de rage imprimée sur papier. Le rappeur a mûri et traduit cette évolution dans un spectacle alliant musique et théâtre construit avec l'aide du patron de l'Ancre Jean-Michel Van den Eeyden. Sympathique et plein d'humour, il peint un portrait sans concession d'une cité noire qu'il aime par dessus tout. Lui qui n'aimait pas l'école aime à parler du problème d'autorité qui règne dans nos lycées, plus lucide que jamais depuis qu'il court les classes avec des animations citoyennes (avec l'association Jeunes & citoyens). Sur les musiques de son comparse Rémon Jr (boîtes à rythme et piano), présent avec lui sur scène, et le très graphique travail vidéo des Dirty Monitor. Ici, Charleroi pourrait parler peu aux cœurs avignonnais mais Mochélan assure une universalité de son histoire, celle d'un gamin d'une ville condamnée devenu artiste un peu par hasard. (Vu le 9 juillet)

Jusqu'au 27 juillet à La Manufacture à 17h10.
La saison prochaine en Belgique: du 11 au 14 février 2014 à l'Eden à Charleroi (Festival KICKS!), du 18 au 22 février 2014 au Théâtre National à Bruxelles (Nouvelles Vagues) et le 30 avril 2014 à la Maison de la Culture de Tournai.
Mochélan sera par ailleurs présent le 17 juillet au Francofolies de Spa pour présenter les titres de son album à venir. Un EP Versus est déjà disponible sous le label Factice/Igloo Records.


Closer (entre adultes consentants)

Crédit: Rebecca Bowring
Les cinéphiles gardent en tête le formidable quatuor (Portman, Roberts, Law et Owen) du film de Mike Nichols. Mais Closer est au départ une pièce de théâtre écrite par Patrick Marber, qui avait d'ailleurs lui-même signé l'adaptation cinématographique. Son texte est riche de répliques cinglantes, parfois crues, dans ce chassé-croisé amoureux entre quatre adultes qui s'aiment et se quittent à la recherche d'un impossible amour parfait. Grand succès des planches genevoises, cette production suisse respecte leurs portraits calibrés: une strip-teaseuse femme-enfant, une photographe indécise, un écrivain raté et un médecin tendre sous des airs de goujat. Plus que la fidélité, c'est l'honnêteté dans le couple qui est ici questionnée. Peut-on réagir en adulte lorsqu'on est/a trompé? On retiendra de cette création de Françoise Courvoisier, habituée du Public où la pièce est programmée, la scène de rupture en miroir et les dernières vingt minutes qui confirment nos impressions sur les qualités de jeu de Vincent Bonillo, sincère, et Sophie Lukas, classieuse. Dommage que la mise en scène classique ne prend pas plus de risques et que l'accompagnement musical résonne parfois à plat. (Vu le 9 juillet)

Jusqu'au 28 juillet au Théâtre des Halles à 21h30.
La saison prochaine en Belgique: du 25 février au 5 avril au Théâtre Le Public à Bruxelles.


* Authentique (hommage à Goscinny)

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