Crédit: Stephan Peleman |
«Médée
est à la fois une femme contre un homme, Jason, mais elle représente
aussi la barbare, l’étrangère face à la civilisation incarnée
par Jason. C’est donc la passion contre la rationalité. Ce sont
des cultures qui se battent. Lors de mes recherches, j’ai découvert
qu’Euripide n’avait pas écrit cette pièce uniquement en
utilisant la mythologie mais aussi en utilisant le contexte de
l’époque. Quelques mois avant la création, une nouvelle loi
annulait les mariages avec une femme étrangère.»
D’où
cette deuxième partie dans votre pièce consacrée à l’exil…
«En
effet, la première partie rappelle l’histoire de base,c’est le
conte épique. La deuxième partie est la confrontation finale de
couples, un peu comme fait Albee dans ‘Who’s afraid of Virginia
Woolf ?’. Je voulais montrer qu’un fait concret était à
l’origine de cette pièce. Parce que je ne comprenais pas le rôle
de Jason. Il a une logique. Il a été loyal envers Médée. Elle
s’est imposée à lui comme une carnivore passionnée de l’amour.
Jason est un brave type en fait.»
Deux
spectacles en même temps, l'un francophone. Une belle
consécration?
«C’est
incroyable. Je peux maintenant prouver que la Belgique existe. Quand
un pays va scinder BHV, réaliser une nouvelle réforme de l’État
et quand un parlement interdit quasi à l’unanimité la burqa, il
est incorrect de dire que ce pays n’existe pas. Ces gens m’accusent
de nier l’identité flamande, ce qui est ridicule car je suis
empreint de cette identité. Même si l’identité belge s’apparente
à du bricolage, elle existe.»
On
vous sent en colère...
«Je
ne peux plus me taire.Je suis Flamand mais pas flamingant. Pour moi,
la Flandre est trop importante pour se laisser maltraiter par les
flamingants. Il est temps que les autres Flamands qui ne votent pas
pour ces partis, disent clairement qu’ils ne veulent pas perdre une
de leurs identités. Ce que fait la N-VA, c’est presque une
trahison envers le mouvement flamand qui était chaleureux,
convivial et pas égoïste, un courant culturel et artistique avant
tout.»
Cette
idée de l’identité et de la langue se retrouve dans votre autre
création sur scène, l’adaptation de votre livre «La langue de ma
mère» («Sprakeloos»). Comment cela s’est passé?
«Sur
scène, je ne peux pas lire le livre entier, ce que j’aimerais mais
cela prendrait deux journées. J’ai écrit le texte de ce spectacle
avec Katrien Jacobs et Hildegard De Vuyst du KVS. Elles m’ont aidé
à déceler les liens et les fils rouges de mon livre. Ce n’est pas
réécrit mais adapté. J’avais besoin d’aide. J’avais déjà
tenté certaines choses auparavant lors de soirées littéraires,
notamment aux Pays-Bas. Je savais quels fragments seraient
utilisables mais j’avais rassemblé en tout six heures. Maintenant
ça fait deux heures et je réfléchis encore à retravailler la
première partie.»
Votre
livre apparaît bavard et éclaté. Est-ce la transcription du choc
de voir ses parents vieillir?
«C’est plus complexe. Evidemment, c’est le choc que tout le monde peut éprouver quand un tel accident arrive à l’un de ses parents (sa mère est victime d’une attaque cérébrale qui la prive de sa faculté de parole, d’où le titre de l’ouvrage, ndlr.). Il y a aussi dans ce texte ma région d’origine,le Waasland. Tout le monde y est très bavard. Les gens font beaucoup de détours pour enfin arriver à exprimer ce qu’ils avaient à dire en premier lieu. J’aime cette tradition. C’est aussi un grand hommage à la langue. Celle d’un écrivain qui voit sa mère perdre sa langue, qui a été l’outil de sa mère au théâtre et qui est aussi celui de l’écrivain que je suis. J’aime en plus écrire pour le théâtre. C’est donc un double choc, celui du fils et celui de l’auteur. Enfin, je tente de revaloriser une perte totale de cette langue en écrivant et en parlant beaucoup.»
«C’est plus complexe. Evidemment, c’est le choc que tout le monde peut éprouver quand un tel accident arrive à l’un de ses parents (sa mère est victime d’une attaque cérébrale qui la prive de sa faculté de parole, d’où le titre de l’ouvrage, ndlr.). Il y a aussi dans ce texte ma région d’origine,le Waasland. Tout le monde y est très bavard. Les gens font beaucoup de détours pour enfin arriver à exprimer ce qu’ils avaient à dire en premier lieu. J’aime cette tradition. C’est aussi un grand hommage à la langue. Celle d’un écrivain qui voit sa mère perdre sa langue, qui a été l’outil de sa mère au théâtre et qui est aussi celui de l’écrivain que je suis. J’aime en plus écrire pour le théâtre. C’est donc un double choc, celui du fils et celui de l’auteur. Enfin, je tente de revaloriser une perte totale de cette langue en écrivant et en parlant beaucoup.»
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